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DreamWorks Animation cherche un second souffle

Alors que le film d'animation Home cartonne aux USA et prépare sa sortie en France (15 avril), prenons le temps d'analyser l'histoire du studio DreamWorks Animation qui semble à la recherche d'un second souffle commercial ces temps-ci.

Les années 90 ont été celles de la révolte de l'industrie occidentale de l'animation face à la domination sans partage de Disney. Pixar, créé en 1986, lance en 1995 Toy Story, le film qui initie vraiment l'ère de la 3D dans l'animation aux USA. Au même moment, Steven Spielberg et ses partenaires essayent de créer un nouveau studio hollywoodien qu'ils nomment DreamWorks SKG. Le nouveau géant du cinéma ouvre en même temps une branche animation et accueil notamment des membres du studio d'animation Amblimation. Il s'agit d'une division d'Amblin Etertainment, la boite de production de Spielberg. Jusqu'à là, ces artistes n'ont produit que trois films mineurs, notamment la suite d'un film d'animation (An American Tail), l'adaptation d'un roman pour enfants (A Dinosaur's Story) et celle de l'histoire vraie d'un chien qui a sauvé des enfants en 1925 (Balto). Les recettes au box office sont mitigées et les ambitions créatives éloignées de l'ogre Disney. Autant dire que DreamWorks Animation va produire des films bien plus ambitieux.

DES DEBUTS PARFAITS

Les années 90 voient donc Disney exploser le box office avec La Belle et la Bête (1991), Aladdin (1992), Le Roi lion (1994), Pocahontas (1995), Le Bossus de Notre-Dame (1996), Hercule(1997), Mulan (1998) et enfin Tarzan (1999). C'est une domination sans partage qui attire de nombreuses convoitises. Pixar réussit son entrée au cinéma avec Toy Story en 1995, puis enchaîne avec 1001 Pattes en 1998. Dreamworks propose un projet similaire la même année : Fourmiz. Ce film rapporte 171 millions de dollars dans le monde pour un budget de 105 millions, en n'étant pas rentable sur le sol américain (ce que regardent en premier les producteurs aux USA). En face, l'oeuvre de Pixar, avec un budget supérieur de 15 millions de dollars, en rapporte 363 dans le monde et 162 rien qu'aux USA. Le studio profite entre autres de la réputation acquise avec Toy Story.

Cependant, la même année, DreamWorks sort en salles Le Prince d'Egypte, adaptation de l'histoire de Moïse. Pour un budget moindre (70 millions de dollars) mais un sujet plus connu, le film rapporte 219 millions de dollars dans le monde. C'est le premier succès incontesté de l'entreprise. Fait intéressant, le film produit à la main marche mieux que celui fabriqué par ordinateur. La révolution CGI est en marche, mais il y a encore une place pour l'animation traditionnelle. Alors que Disney entame plusieurs années de galère et que Pixar ne sort qu'un film tous les deux ans environs, DreamWorks enchaîne en 2000 avec deux nouveaux films. La Route d'Eldorado du français Eric Bergeron est malheureusement un flop commercial (50 millions de dollars de recettes aux USA pour un budget de 95). Encore une fois, c'est le film moins bankable à la base qui se démarque. Chicken Run, produit avec les anglais de Aardman Animations, ravit les spectateurs par sa folie en stop-motion. De belles recettes (225 millions de dollars) pour un des plus petits budgets du studio (45 millions) vont établir la réputation de la brance animation de l'entreprise.

DreamWorks créé donc à cette époque la branche officielle DreamWorks Animation pour produire à un rythme élevé ces films. On passe à une sortie annuel avec ZE film qui va tout changer : Shrek. L'ogre vert rapporte 484 millions de dollars (pour un budget de 60), mais il va surtout asseoir la position du studio sur le podium de l'industrie. C'est le début d'une incroyable saga très lucrative qui va aussi marquer le savoir-faire du studio en animation auprès des critiques.

Après avoir conquis le public, il faut confirmer. Disney n'est pas le roi de l'animation pour rien après 80 années de hauts et de bas. Il faut savoir se renouveler. Malheureusement, que ce soit Spirit en 2002 ou Sinbad en 2003, le studio ne trouve pas la bonne formule et ce sont deux échecs commerciaux cuisants. Il se reprend bien en 2004 avec Gang de Requins puis Nos Voisins les hommes en 2006. Entre temps, une nouvelle collaboration avec le studio Aardman Animations donne naissance à un autre film en step-motion : Wallace et Gromit. Le succès est encore au rendez-vous et conforte la stratégie de diversification du studio.

A LA RECHERCHE DE LA NOUVELLE FRANCHISE

Toutefois, si Disney ne propose les suites à ses œuvres qu'en direct-to-dvd, Pixar et DreamWorks sont friands de trilogie (voir plus) au cinéma. Il faut capitaliser sur les points forts de ces jeunes catalogues. Ainsi, Shrek 2 en 2004 va tutoyer les sommets en rapportant 920 millions de dollars dans le monde ! C'est de la folie. Outre l'incroyable manne financière, cela établit définitivement le studio comme un acteur majeur de l'industrie du cinéma en général et pas seulement dans l'animation. Cela permet aussi de se protéger de contre-performances commerciales, comme Souris City en 2006 et Bee Movie en 2007. Cette même année, Shrek 3 rapporte 800 millions dollars supplémentaires à la franchise, sans compter tous les produits dérivés.

Le studio tourne très bien, mais il doit trouver de nouvelles franchises pour diversifier son offre et ne pas être dépendant de Shrek ou d'un succès occasionnel. Ce sera Madagascar dès 2005 (533 millions de dollars de recettes pour un budget de 75) et Kung Fu Panda en 2008 (632 millions de dollars pour 130). La première franchise ne sera jamais aussi forte que Shrek mais va remplir les caisses du studio en 2008 et 2012, sans compter le spin-off de l'été dernier. À ce sujet, celui de Shrek (Le Chat Potté) sera un énorme succès avec 555 millions de dollars de recettes. Quant à Kung-Fu Panda, il va lui aussi rapporter énormément tout redéfinissant la qualité d'animation des films DreamWorks. Le second opus proposé en 2011 propose certaines scènes d'une beauté inimaginable, aussi bien en terme de dynamisme que de colorisation.

DreamWorks remporte ainsi plusieurs fois la guerre annuelle des films d'animations. Pour ce faire, le studio a abandonné ses expériences d'animation à la main, en 2D et stop-motion pour se focaliser sur des films 3D à la pointe de la technologie CGI. On cherche à maximiser les profits en développant des franchises multimédias. La division animation de l'entreprise est cotée en bourse dès 2004, ce qui change son management. Un studio est ouvert en Inde pour multiplier les capacités de production. Les ambitieux sont énormes, comme quand l'entreprise s'attaque au marché chinois en 2012. Elle cherche aussi à se développer dans la presse et à la télévision.

En 2009, DreamWorks se convertit à la mode de la 3D au cinéma en produisant un film pensé pour ce visionnage : Monsters Vs Aliens. Joli succès critique et public sans être un hit, il va préparer la voie pour Dragon, la nouvelle franchise phare du studio. Enfin, c'est ce qu'on pense car en analysant bien les chiffres, les deux films ne surpassent pas les Shrek, Madagascar et Kung Fu Panda en terme de recette. Ils font même moins bien, alors que les critiques sont dithyrambiques. Chose intrigante, le studio ne souhaite pas « cramer » la franchise et attend quatre ans avant de proposer le second volume des aventures de Harold. C'est louable, mais c'est une longue attente qui va faire paradoxalement faire retomber l'excitation autour de la saga.

Le problème, c'est que les autres nouvelles licences ne vont pas prendre le relais correctement. Malgré leurs qualités, Megamind en 2010 et Rise of The Guardians en 2012 ne font que rentabiliser leurs budgets aux USA, se goinfrant surtout à l'étranger. On peut carrément dire que le second est un échec. Kung Fur Panda 2, Shrek 4 ou Madagascar 3 sont là pour satisfaire les actionnaires, pas spécialement les créatifs. L'année 2013 est mitigée. The Croods cartonne (587 millions de dollars pour 135) alors que Turbo se crash (83 millions de recettes aux USA pour un budget de 135). En face chez Disney Planes fait autant avec un budget trois fois plus petit.

La situation est claire maintenant chez Dreamworks. Les franchises Shrek et Madagascar sont cramées. On attend avec impatience la fin de la trilogie Kung Fu Panda, prévue pour l'année prochaine. Dragons 2 n'a pas été le relais commercial espéré et le troisième opus ne sortira qu'en 2018. La seule licence prometteuse, c'est The Croods avec un second opus pour Noël 2017. En attendant, il faut produire de nouvelles licences. Alors que les critiques et analystes prédisaient pour le nouveau film du studio, Home, une contre-performance, son premier week-end d'exploitation aux USA a surpris tout le monde. Il fait mieux que Dragon 2 et pourrait intégrer à terme le top 10 des films DreamWorks (sur 31 déjà sortis). À nous de découvrir dans deux semaine si la qualité est au rendez-vous !

DreamWorks Animation s'est durablement installé dans le paysage cinématographique. Seul concurrent de taille face au duo terrible Disney-Pixar depuis le rachat du second, il est capable de surprendre le public en proposant des films variés, aussi beaux qu'intéressants. Le studio cherche actuellement son nouveau Shrek alors que Disney profite encore du succès historique de La Reine des Neiges. 

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