Pop Fixion

Senran Kagura : la parodie au service de l'ecchi

Souvent exportée en dehors du Japon, Senran Kagura est une série de jeux vidéos assez coquine, mêlant de l’action et un côté fripon.

Le Japon est parfois perçu comme un pays paradoxal : la population est très réservée sur la sexualité et l'on pourrait croire que le pays est très prude. Or il existe une fête de la fertilité avec des chars représentant des pénis, un temple dédié à la poitrine, et des rayons de jeux et mangas comprenant du contenu sexuel, parfois avec des catégories qui font polémique en occident quand les filles ont un aspect enfantin et sexualisé (Par exemple, le Lolicon).

Pourtant, on ne pourra pas reprocher au Japon de ne pas être un pays créatif, et ce quelque soit le média pop-culture visé. En brassant beaucoup de genres différents comportant de nombreux créatifs très prolifiques, il arrive aussi que dans ce qu'on appelle les « jeux de niche », on trouve des curiosités qui valent le coup d'oeil, et c'est ici que se range Senran Kagura.

Par son aspect, il est souvent vu comme : « Oh, encore un jeu avec des gros seins pour des ados mâles cis hétéro en manque. » Toutefois, ce serait regarder le jeu que sous une seule de ses facettes. Car en réalité, il est bien plus fourni qu'on le pense, et c'est dans sa seconde lecture qu'on trouve quelque chose entre les fesses et les seins de ses protagonistes : une parodie du genre ecchi, du fan-service, très souvent servi avec des jeux aux gameplay fun et nerveux.

Garanti sans rembourrage

Senran Kagura est une licence née de l'esprit fripon de Kenichiro Takaki. Ce n'est pas la première fois que ce créateur de jeux vidéo s'illustre avec des héroïnes féminines aux formes généreuses avec un aspect coquin : il a créé les adaptations vidéoludiques de licences comme Ikki Tousen, To Love-Ru, ou encore Maho Sensei Negima. Mais c'est avec Senran Kagura qu'il pourra donner libre cours à son expérience sur le sujet, en étant aux commandes de l'intégralité du projet.

Pour Senran Kagura, Takaki s'en donne à cœur joie en créant un univers moderne dont l'intégralité du casting (sauf rares exceptions) est de sexe féminin, assez jeune, et avec des attributs très prononcés. Cet aspect fan-service sera renforcé avec des dialogues, situations, costumes faisant la part belle à nos héroïnes, et Takaki ne sera pas avare envers les otakus : beaucoup de produits dérivés verront le jour, pour rendre ces waifus aussi interactives que possible.

Victoria n’aura plus de secrets pour vous

C'est lors de l'année 2011 que naît la licence avec Senran Kagura : Shojo-tachi no Shinei, qui ressortira chez nous sous le nom Senran Kagura Burst en 2014. Version augmentée de la version japonaise, il s'agit d'un beat them all en 3D où l'on affronte des vagues d'ennemis avant d'affronter un boss, souvent une autre fille du casting. La majeure partie de la série se démarquera par la suite du beat them all, et fait parfois des incursions dans le jeu de cuisine / rythme (SK : Bon Appétit !), le jeu de tir avec des pistolets à eau et des maillots transparents (SK Peach Beach Splash !) ou même le jeu de cartes à collectionner sur mobile (SK New Wave)

La majeure partie de la série est développée par le studio Tamsoft, et il existe également une série animée, des mangas et des OAV pour étoffer l'univers du jeu, en offrant toujours des situations absurdes propices à l'appréciation lubrique et coupable de ces jeunes filles, avec parfois des collaborations pour ajouter encore plus de filles au casting : Ayane, Marie-Rose et Honoka de Dead or Alive sont les récentes demoiselles invitées pour se frotter à nos guerrières, en plus de celles d'Ikki Tousen.

On pourrait donc se dire jusqu'ici que Senran Kagura est encore une licence typiquement japonaise créée dans un pays où l'amour ne se conjugue plus forcément au réel.

Cinquantes nuances de fesses

Si l'on devait donc résumer Senran Kagura en quelques mots, ce serait de l'action, des jeunes filles aux formes généreuses très mises en avant (parfois de manière cocasse), et un scénario très bateau qui reprend tous les poncifs du shônen avec tout ce que cela inclut de bons sentiments, de situations humoristiques, et de défis qui se présentent à nos héroïnes..

Nous suivons l'académie Hanzo, comprenant cinq jeunes filles voulant devenir des shinobi, comprenez des filles ninjas, qui seront envoyées sur des missions de la plus grande importance. On suit donc la bande composée d'Asuka, Ikaruga, Katsuragi, Yagyu, et Hibari. Elles croiseront parfois le chemin de l'académie clandestine de Hebijo, composée de Homura, Yomi, Hikage, Miraï, et Haruka.

Selon les épisodes, d'autres filles des branches secondaires (ou d'autres factions) viendront se joindre à l'intrigue, avec toujours ce point commun mammaire. L'intrigue alternera donc parfois entre la quête de réussite, la rivalité avec l'autre école, ou mettre fin à une menace, et reprend tous les poncifs de la quête initiatique d'un shônen : super attaques, progression du héros, dialogues bourrés de bons sentiments et de morale, présence d'un sensei...

« Violets are blue, Roses are Red, I see Asuka’s underp... »

Et c'est à ce moment-là qu'une seconde lecture de toute la licence est possible. C'est générique, prévisible, et ça reprend ce qui se fait déjà dans le genre. Mais au détour d'un dialogue, quand une fille au physique de loli doute de son talent car elle n'a pas de poitrine (et toutes les amies lui disent que « Non, être une shinobi c'est dans son cœur ! »), qu'on réalise que le fan-service n'est pas le but de la licence, mais le terreau de celle-ci.

Tout le merchandising tourne autour des seins, ou des fesses des personnages. Les finish moves des jeux mettent à mal nos héroïnes avec des poses humiliantes (poulpe, serviette, filet de volley, tout y passe...), et le scénario, même s'il ne réinvente jamais la roue, donne tellement d'instants gratuits (Katsuragi adore le harcèlement sexuel) qu'on ne peut jamais prendre ça comme un supplément lubrique, mais une satire du fan-service et des otakus, en allant de plus en plus vers la surenchère. Un contenu téléchargeable de Peach Beach Splash permet, entre autres, d'arroser les filles avec du lait blanc colorable en jaune ; les esprits les plus déplacés apprécieront…

100% Naturel ?

De ce fait, Senran Kagura, en accordant une place de choix à autant d'instants triviaux, pourrait presque tourner vers la parodie de la culture otaku, avec même les héroïnes qui sont fans de shônen (certaines missions spéciales d'Ikaruga permettent de découvrir la fandom dont elle fait partie) ou des références vestimentaires (Un personnage secondaire, Daidôji, est habillée comme Jôtarô Kujô de JoJo's Bizarre Adventure : Stardust Crusaders), mais la parodie s'efface par moments.

C'est en effet ce qui viendra nuancer le propos de cet article visant à apprécier la licence sous le terme du second degré. Il arrive un moment où cette surenchère nous questionne sur l'ensemble de la série : est-ce réellement une parodie assumée, ou une réussite du fan-service poussé à outrance grâce à de bons jeux ?

Senran Kagura se permet tellement de choses qu’on se demande si la volonté de parodier subtilement existe, et la frontière est mince ; le Japon voit naître tellement de nouvelles licences qui s’en inspirent (Valkyrie Drive, du même créateur) ou connaît déjà des licences qui vont plus loin (Criminal Girls, par exemple) qu’on peut douter de cet aspect parodique.

Jusqu’à l’an dernier, Senran Kagura pouvait être encore pris sous cet angle, mais le cas évoqué avec le DLC de Peach Beach Splash et le prochain jeu sur Nintendo Switch qui sera un dating sim avec la gestion de la poitrine ressentie via la vibration HD de la console, on peut se poser la question : parodie, ou victoire du fan-service ? Est ce que le fan-service est replacé au coeur de la licence, ou bien le fun procuré par les jeux en question ?

C'est sur cette question que Senran Kagura pourra vous laisser après avoir découvert la licence ; mais quel que soit votre camp, il reste qu'on a là une très bonne série de jeux d'action, avec des personnages assez charismatiques, et même s'ils répondent à des clichés déjà vus, ils mélangent avec brio du fun sans prise de tête et de l'appréciation coupable de formes féminines peu respectueuses des lois de la gravité.

Aucun commentaire

Sur le même thême

Pop Fixion

A propos de Pop Fixion

Pop Fixion est un magazine proposant des articles sur la Pop Culture et ses médias : comics, mangas, BD, jeux vidéo, films, animation, séries tv et romans.

Informations complémentaires

Vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données qui vous concernent conformément à l'article 34 de la loi "Informatique et Libertés" du 6 janvier 1978. Vous pouvez à tout moment demander que vos contributions à ce site soient supprimées.